Sans surprise, la proposition de loi visant à lutter contre la haine sur Internet a été adoptée hier par l’Assemblée nationale. Plus connu sous le nom de loi Avia, ce texte a été âprement débattu depuis sa naissance en mars 2019 et reste très controversé un an plus tard. Le palais Bourbon a néanmoins validé le texte dont certaines mesures devraient entrer en application le 1er juillet. Après plus d’un an de navette parlementaire, petit point sur ce que ce texte va changer.
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Le retrait des contenus en 24h
Mesure phare du texte, l’obligation pour les grandes plateformes de retirer des contenus en moins de 24h est aussi la mesure qui a fait le plus parler d’elle. Concrètement, les mastodontes du web que sont Facebook, Twitter, Instagram, etc., devront désormais retirer tout message « manifestement illicite » au maximum 24h après en avoir été notifiés. Un délai que beaucoup d’acteurs du web trouvent trop court et qui risque, selon certains, d’encourager la censure préventive par peur de l’amende. Les contenus pédopornographiques ou terroristes devront, eux, être supprimés “sous 1h” .
Il faut dire que l’amende en cas d’entorse à la loi est dissuasive : jusqu’à 1,25 million d’euros ou 4 % du chiffre d’affaires mondial. On ne sait pas encore quels sites rentreront dans le giron de la loi, mais d’après Lætitia Avia, ce ne sera pas plus d’une poignée. Un décret devrait arriver dans les prochaines semaines pour éclaircir ce point.
Éducation, parquet dédié et observatoire
L’autre morceau du texte — moins répressif, lui — se concentre sur ce qui entoure les réseaux. Ainsi, un volet éducatif est prévu avec “des modules de lutte contre la diffusion de messages haineux en ligne” et une formation à l’utilisation “responsable” des outils et des ressources numériques scolaires.
Un observatoire de la haine en ligne va également être créé, ainsi qu’un parquet capable de juger les auteurs de messages haineux. C’est le CSA qui sera chargé de veiller au bon fonctionnement de la loi. L’organisme sera d’ailleurs en mesure d’exiger une peine d’un an de prison accompagnée de 15 000 euros d’amende en cas de signalement abusif.
Les pouvoirs étendus que ce texte laisse aux grandes plateformes, le non-recours à un juge et les risques de surcensure ont été largement évoqués pendant les débats, sans que le texte ne change de façon significative. La question de ce qui constitue un message « haineux » sera également laissée à l’appréciation des plateformes. Dénonçant une loi “juridiquement faible” et qui “porte atteinte à la liberté d’expression” , Bruno Retailleau, sénateur LR, a annoncé qu’il saisirait le Conseil constitutionnel.